
Migrations, diasporas, communautés : autant de notions, autant de concepts – pour le moins ambigus – qui concernent les populations noires des Amériques et s’inscrivent au cœur des grands débats actuels. Comment en effet envisager la notion de « diaspora » lorsque l’on est confronté à un tissu complexe de cultures diverses ? Comment parler de « communauté » lorsque des peuples ne semblent se conformer à aucun modèle stable d’identité, pas même à celui réputé dynamique de l’« hybridité » ? Utilisant les incertitudes de la notion de « diaspora », les ambiguïtés de son usage, Christine Chivallon s’appuie sur les faiblesses du concept pour proposer une approche inédite de la complexité des cultures noires américaines et tenter de cerner dans leur pluralité les lignes de force en jeu. Centré sur des exemples puisés dans la Caraïbe, l’ouvrage opère un va-et-vient entre théories et expériences sociales. Il envisage l’histoire de la transportation aux Amériques, la matrice des sociétés de plantations, les résistances culturelles des esclaves et de leurs descendants, les situations migratoires récentes depuis les Amériques, les...
Après avoir rassemblé les diverses composantes d'une archéologie du métissage, cette étude met en relief les différentes représentations de l'homme de couleur du XIXe siècle. La littérature des Antilles est en effet, dès l'origine, travaillée par un discours du métissage qui se modifie en fonction du groupe sociologique auquel appartiennent les auteurs. De même, les représentations littéraires du métis varient en fonction du jugement, positif ou négatif, porté sur le métissage.
Le présent ouvrage s’intéresse à une question-clef du champ historique contemporain : dans quelle mesure l’Histoire et les historiens participent-ils à l’élaboration d’une identité nationale ? Jusqu’à présent, avait été presque exclusivement examiné le cas des nations européennes. Pour la première fois le processus est, enfin, analysé dans le détail pour un État africain. Ce livre fournit un exemple exceptionnel de la place et du rôle de la discipline historique dans la construction identitaire d’une population africaine. Grâce à l’étude systématique des travaux de recherche soutenus au Niger durant les soixante dernières années (thèses, mémoires de maîtrise...), il reconstitue minutieusement les efforts d’une petite communauté de chercheurs, venus d’horizons divers, pour établir les bases culturelles du nouvel État. Il montre avec finesse que faire de l’histoire n’est jamais neutre, au Niger comme partout ailleurs c’est prendre position, d’une façon ou d’une autre, dans une entreprise susceptible de consolider l’aventure identitaire d’une nation confrontée à de nombreux défis. La plupart des historiens nigériens...
De la révolution haïtienne de 1791 à l'élection du premier président noir des États-Unis en 2008, en passant par les indépendances des États africains et la lutte contre l'apartheid, l'itinéraire de ceux qui ont mis leur vie au service de la libération de l'Afrique et de l'émancipation des Noirs à travers le monde. De New York à Monrovia, de Londres à Accra, de Kingston à Addis-Abeba, une polyphonie rassemblée sous son slogan fédérateur : "Africa Unite !". Sommes-nous africains ? Qu'est-ce que l'Afrique ? De cette double interrogation, née au XVIIIe siècle dans la diaspora africaine déportée aux Amériques, a émergé un vaste mouvement intellectuel, politique et culturel qui a pris le nom de panafricanisme au tournant du XXe siècle. Ce mouvement a constitué, pour les Africains des deux rives de l'Atlantique, un espace privilégié de rencontres et de mobilisations. De la révolution haïtienne de 1791 à l'élection du premier président noir des États-Unis en 2008 en passant par les indépendances des États africains, Amzat Boukari-Yabara retrace, dans cette ambitieuse fresque historique, l'itinéraire singulier de ces personnalités qui, à l'image de...
L'histoire de Jean-Jacques Dessalines est liée à celle de son pays, Haïti, qui a célébré récemment le bicentenaire de son indépendance. Cette indépendance est née de la résistance à Saint-Domingue de la masse des esclaves accompagnés de quelques libres sous la direction du principal dirigeant de cette épopée anti-esclavagiste et anti-colonialiste : Jean-Jacques Dessalines. Guerrillero hors pair, ayant lutté contre les colonisateurs espagnols, anglais et français, il a toujours été la cible d'une haine viscérale de ses détracteurs qui n'ont cessé de le diaboliser. Cet ouvrage commémore le bicentenaire de son assassinat.
Cet ouvrage incisif de l'historien américain Clarence Walker révèle la nature et la signification du courant "afrocentriste" aux Etats-Unis. Confrontés aux discriminations et aux humiliations d'un durable racisme yankee, les Noirs ont été tentés par une fuite en arrière vers la vision romantique d'une Afrique merveilleuse sortie d'une Egypte noire, mère de toutes les civilisations, dont l'héritage aurait été volé par les Blancs. Cette "mythologie thérapeutique" est devenue une culture populaire des communautés noires. A défaut de permettre "un impossible retour" à une Afrique rêvée et à un temps des origines, l'afrocentrisme a des retombées idéologiques bien réelles dans le discours de certains cercles intellectuels. Le lecteur trouvera ici un texte sans concession, nourri d'une érudition rigoureuse et pétri de respect et de solidarité à l'égard de tous les exclus.
"N'engage pas le débat lors d'un diner car celui qui n'a pas faim aura le dernier mot." Cette citation de Richard Whateley résume bien cet ouvrage d'Ousmane Sonko. Loin du tumulte soulevé par le débat sur la découverte, et surtout la gestion du pétrole et du gaz au Sénégal dont il a été un des acteurs, il a opté pour une démarche pragmatique, au moyen du support de l'écrit, pour édifier une opinion abusée et profane en cette matière complexe. Il éclaire, argumente et documente, démêle et explique tous les enjeux liés aux affaires traitées : "Au-delà du pétrole et du gaz, l'affaire, révélée par le dossier PETRO-TIM, a des implications insoupçonnées aux plans démocratique, institutionnel, administratif, judiciaire, citoyen, national et international. C'est pourquoi nous avons senti l'impérieuse urgence de ce livre de clarification et de mémoire". Au fil des lignes, ce qui frappe le plus, c'est la trame et la précision argumentaire et documentaire ; la maîtrise d'un sujet qui, a priori, ne relève pas de la formation intrinsèque de l'auteur. L'ouvrage apparaît ainsi comme un bréviaire pour qui veut comprendre la problématique des ressources...
Parce que mal connue dans les universités occidentales et dans celles d'Afrique, la philosophie africaine gagne à être questionnée et examinée minutieusement. C'est ainsi que la nécessité de l'élaboration d'une histoire de la philosophie est devenue impérieuse. Ainsi le Livre I jette-t-il les bases d'une histoire de la philosophie ancienne, tandis que le Livre II s'est donné pour tâche la constitution d'une histoire de la philosophie africaine moderne et contemporaine (1945-1990). Le Livre III étudie les grands courants de pensée ainsi que les principaux ouvrages de cette philosophie. Le Livre IV, qui achève le programme, examinera pour sa part le travail le plus récent et sans doute le plus ambitieux de cette philosophie, qui s'est effectué de 1990 à nos jours.
Il y a un demi-siècle, le chercheur sénégalais Cheikh Anta Diop posait la question de la négritude de l'Egypte et de l'antériorité des civilisations nègres. Aujourd'hui, c'est d'Amérique du Nord que nous viennent les échos d'une telle contestation de l'histoire écrite par les Blancs. Les thèmes en sont multiples. Ne serions-nous pas tous les enfants d'une Eve noire ? La première civilisation ne fut-elle pas africaine, rayonnant ensuite de son berceau égyptien jusque dans la Grèce classique ? La déesse Athéna n'avait-elle pas une origine noire ? Les Hébreux n'auraient-ils pas eu l'Ethiopie pour vraie patrie ? La réécriture du passé des Africains, vu à la lumière de l'Egypte pharaonique, suscite une relecture du passé européen. Les humanités gréco-latines se voient opposer des humanités négro-égyptiennes. Des jeunes Noirs des métropoles des pays du Nord apprennent les hiéroglyphes et chantent contre la Babylone des Blancs. Et dans les pays du Sud, les Bantous sont érigés en équivalents des Aryens. Plus loin, l'Amérique aurait été découverte et peuplée par des Noirs, déjà présents dans les civilisations précolombiennes. Toute...
Pendant la domination espagnole en Amérique Latine du xvie au xixe siècle, l'Espagne était, en tant que métropole, l'interlocutrice naturelle des autres nations européennes. Tout ce qui était lié à l'itinéraire Europe-Amérique hispanique passait par la couronne espagnole, ou du moins c'est ce qu'elle prétendait : les idées, les arts, les institutions, les marchandises, les nouvelles, les voyageurs, etc. Cependant, après les guerres d'indépendance qui eurent heu au début du xixe siècle et qui furent la conséquence directe de l'affaiblissement de la monarchie espagnole après l'invasion du pays par les troupes de Napoléon Ier, les pays libérés du joug espagnol établirent de nouvelles relations avec l'Europe, fixant leurs propres règles et laissant voir leurs préférences pour certaines nations européennes.
Le patrimoine se décline en objets, en monuments, en forêts, en traditions et récits, mais il se dit toujours en « mots ». C'est en mots que se définissent les critères (exceptionnel, universel, symbolique, immatériel, intégrité, authenticité, identité, nature, culture,...) qui conditionnent, en particulier, la reconnaissance internationale d'un bien patrimonial par l'Unesco. Comment s'opère donc le passage des langues « internationales » aux langues d'Afrique ? À travers la constellation des mots « musée » et « patrimoine » et leurs « équivalents » travaillés en sept langues – ici : en français, anglais, fulfulde et bamanakan, bientôt en swahili, sukuma et tsonga pour la seconde livraison – Les intraduisibles du patrimoine proposent quelques pistes pour alimenter la réflexion sur les enjeux, y compris politiques, du patrimoine dans un contexte mondialisé.
Sous la direction de Jérémie Kroubo Dagnini, vingt intellectuels de haute facture, parmi lesquels Christian Béthune (Université Jean Monnet), Éric Doumerc (Université de Toulouse 2), Steve Gadet (Université des Antilles), Stéphanie Melyon-Reinette (Université des Antilles), Christine Dualé (Université de Toulouse 1), Marco Robinson (Rust College, Mississippi), mais aussi le conteur franco-camerounais André Ze Jam Afane et le chanteur réunionnais Danyel Waro, rendent un vif hommage aux musiques noires, recensées désormais au patrimoine musical mondial. Dans le cadre d'une approche pluridisciplinaire faisant appel autant aux réflexes d'historien que de sociologue, d'anthropologue, d'ethnologue, de musicologue, de spécialiste des études postcoloniales, de caraïbéaniste ou tout simplement d'artiste, ces penseurs ont décidé d'oeuvrer en commun pour répondre à de nombreuses interrogations sur le sujet : dans quel(s) contexte(s) se sont développées ces musiques ? Quel est leur but ? Quelles pratiques comportementales (rituelles, vestimentaires, corporelles, sexuelles) les accompagnent ? Quels messages (politique, social, idéologique) se diffusent par leur biais ...
«The problem of the Twentieth Century is the problem of the color line.» À l'orée d'un nouveau siècle, les essais ici rassemblés, fruits d'un atelier de l'AFEA, apportent une réflexion sur le sens de l'intuition de W.E.B. Du Bois. L'opposition blanc/noir débouche sur une gamme de tons qui introduit dans la pensée et les textes théoriques la notion de métissage et de créolité ou de «passing». Très présente dans les œuvres d'écrivains, peintres ou musiciens, la couleur apparaît aussi dans le vernaculaire. «Black is the color of my country». La couleur est une expérience, un vécu que l'individu et la société expriment par des représentations organisées et hiérarchisées et des appréhensions différentes du temps et de l'espace. La «couleur du temps» évoque à la fois les intensités de vies individuelles et collectives et les aléas qui président à ces mutations. Comme indice ou symptôme, la couleur renvoie aux grands drames du passé et révèle des formes qui donnent à voir les stratégies d'écriture de l'histoire. Entre omniprésence et oubli s'installe un jeu de plusieurs temporalités qui fixe, capte, mémorise ou efface la singularité de...
Dans ce climat général d'anesthésie contemporaine, dans la course à l'informatisation et à la recrudescence du religieux cachant mal des modes de pensée autoritaires, dans le cynisme ambiant du nouvel ordre international et du réveil brutal des nationalismes, en ces temps niais où le brouillage des repères incite les nantis à proclamer la venue du "dernier homme" (Fukuyama), en cette période où la philosophie (certaines philosophies occidentales ! ) semble démissionner dans sa lutte contre la misère et la désespérance pour se réfugier dans le confort benoît d'une exégèse qui reste à la marge de "l'Hybris", le message de la Théorie Critique de l'Ecole de Francfort redonne au Sujet la possibilité de dire NON. La critique des "arcana dominationis" élaborée par Adorno, Horkheimer, Marcuse et Habermas a suggéré une double lecture de la Théorie Critique du point de vue de la catégorie de possibilité. Comment parler du possible dans ce monde devenu impossible ? Et comment faire advenir le non-encore dans une modernité africaine désespérée ? Ce livre fait d'abord une lecture de la Théorie Critique et répond à deux questions : comment s'articule la...
Lettres noires : des ténèbres à la lumière - c'est sous ce titre qu'Alain Mabanckou prononçait, le 17 mars 2016, sa leçon inaugurale en tant que professeur invité au Collège de France, une leçon qui vit se bousculer plus d'un millier d'auditeurs. Conforté par cet écho, Alain Mabanckou a battu le rappel des chercheurs, écrivains et penseurs de l'Afrique postcoloniale, les conviant à venir débattre sur le thème Penser et écrire l'Afrique aujourd'hui. Ce sont les actes de ce colloque, en date du 2 mai 2016, que nous publions, soit les interventions de 19 participants issus de tous les champs du savoir et de la création littéraire. Le souhait profond est que ce colloque " résonne comme un appel à l'avènement des Etudes africaines en France ". C'est une façon de s'interroger sur " le retard pris par la France dans la place à accorder aux études postcoloniales pendant qu'en Amérique presque toutes les universités les ont reconnues et les considèrent comme un des champs de recherche les plus dynamiques et les plus prometteurs. " Alain Mabanckou est né à Pointe-Noire (République du Congo). . Il est l'auteur d'une dizaine de romans dont Verre cassé (2005),...
Femme-continent noir, Afrique mystérieuse, idéologie de la noirceur. Analysant signes et stéréotypes, Awa Thiam tente de cerner les mécanismes qui ont cautionné des œuvres de mort, légitimé la domestication d’êtres humains, décrété arbitrairement des interdits et des permissivités.
Date de première parution : 1781 « Je sais que vous ne connaîtrez jamais cet Ouvrage, et que la douceur d’être béni par vous me sera toujours refusée. Mais j’aurai satisfait mon cœur déchiré par le spectacle de vos maux, soulevé par l’insolence absurde des sophismes de vos tyrans. Je n’emploierai point l’éloquence, mais la raison, je parlerai, non des intérêts du commerce, mais des lois de la justice. » Condorcet
Pourquoi la notion de "risque", issue des domaines de la navigation et du jeu, peut-elle aujourd'hui s'appliquer à des actions aussi diverses qu'implanter une maison sur les flancs d'un volcan, avoir des rapports sexuels non protégés ou manger du poulet ? Depuis les années 1970, le "risque" est un moyen parmi d'autres de traiter l'incertitude diffuse qui gagne notre monde. Jusqu'alors, le terme de "catastrophe" suffisait à appréhender les multiples variantes des phénomènes ponctuels de paroxysme. De désastres en fléaux, de sinistres en calamités, l'Occident s'est représenté les catastrophes suivant un cours complexe dont François Walter explore les méandres. Pourquoi l'âge classique redoutait-il tant le passage des comètes et leurs présages ? Qu'est-ce qui pousse le siècle des Lumières à se laisser fasciner par le spectacle des éruptions volcaniques ? Prométhéen, le XIXe siècle l'est-il vraiment qui semble se résigner à la succession des catastrophes industrielles et minières ? Et que dire de la déréliction du dernier siècle confronté aux catastrophes morales absolues, Auschwitz et Hiroshima ? Loin du schéma réductionniste selon lequel nous...
Ce livre est consacré aux écrivains originaires des colonies françaises d'Afrique et des Antilles qui ont vécu à Paris entre 1920 et 1960. Il s'agira notamment de chercher à comprendre comment les plus représentatifs d'entre eux - R. Maran. L.-S. Senghor, A. Césaire. E. Glissant, Mongo Beti - se sont construit une identité d'écrivain selon la logique propre au champ littéraire parisien. Du fait de leurs origines et de l'époque considérée, cela revient à étudier leur rapport à l'Afrique, tant d'un point de vue sociopolitique que littéraire. Les premières études qui leur ont été consacrées ont consisté en de vastes synthèses qui apportaient un éclairage historique, linguistique, psychologique et biographique sur une littérature qualifiée d'africaine. Les recherches récentes, au contraire, tendent de plus en plus à aborder les études littéraires dites " francophones " dans une perspective relationnelle et à rechercher le lien qui peut exister entre les œuvres qui occupent l'espace littéraire francophone. Ces nouvelles approches sont à compléter par une étude de la place qu'occupent les auteurs afro-antillais au sein de l'institution littéraire...